Le Kazakhstan à toute vitesse

Ne prenons pas le Kazakhstan comme un imprévu ou une déconvenue, et essayons de profiter de cet immense pays dont on ne verra qu'une infime partie. C'est ce qu'on s'est dit en se dirigeant vers la frontière kazakh juste après avoir obtenu notre visa à l'ambassade de Tashkent. Alors on roule vers ce pays en ayant envie d'en profiter, mais aussi en pensant à notre visa kirghiz qui est déjà entamé.

 

A la frontière, c'est la cohue, mais les officiels nous ont repérés et nous filent des questionnaires en anglais avant de nous faire passer devant tout le monde. Point de questions embarrassantes sur les nuits que nous avons passées sans enregistrement, ni de fouilles à la recherche de devises cachées. Non, contrairement à toutes les histoires qu'on a entendues et qui peuvent faire peur, le passage des douanes ouzbek se fait sans douleur. Du côté kazakh, des policiers aux dents dorées (décidément!) coiffés d'une immense casquette sans doute héritée de l'ère soviétique nous accueillent avec le sourire et l'haleine légèrement chargée de vodka. La brigade anti-drogue est sur le pied de guerre. Un douanier qui a l'air de tout juste sortir de sa sieste va chercher son redoutable chien, un toutou qui tient plus du teckel que du doberman. Après avoir uriné sur la porte d'entrée, le chien s'approche de nos vélos et trouve bien évidemment que nos sacoches pleines de bouffe sentent bon. Finalement rien à signaler ; circulez m'sieurs dames!

 

Les vélos auraient bien besoin d'une révision. Mon pédalier est dans un sale état et ma tige de selle est cassée. On ira donc à Almaty où on pourra trouver du matériel adapté. Oui, mais comment? Almaty est à 800 kilomètres, et à raison de 80 kilomètres par jour (ce qui inclut les pauses pipi, manger, et petite bière) ça nous prendrait 10 jours et ce n'est pas envisageable pour nous.

On fera d'abord une pause à Shymkent, où on profitera du bazaar. Les Kazakhs sont un peu différents. Plus grands et plus forts, les pommettes plus saillantes et plus rouges, sans doute usées par le soleil des steppes ou par la vodka. Et les sourires sont toujours là, toujours dorés et toujours accueillants.

On s'est décidés à prendre le bus de Shymkent à Almaty ; 600 kilomètres dans un bus français des années 80. Pendant que le bus est secoué par les cahots de la route et que la vitre à ma droite est sur le point de se faire la belle, les télés balancent des films américains mal doublés en russe. Les doublages russes sont intéressants : un homme fait toutes les voix, masculines et féminines, en lisant son texte sur un ton monocorde et avec un léger retard, amusant! A travers les vitres (qui manquent de tomber, je le rappelle), les steppes défilent et on regrette un peu de ne pas être sur nos fidèles montures.

 

Almaty, l'ancienne capitale kazakh, c'est un retour en Europe. Des boutiques modernes et chics, des magasins de vélo qui ont autre chose que des stocks de brols chinois, des restos sympas... C'est pour nous le temps de faire réparer les deux ou trois problèmes cyclos, de se rhabiller presque des pieds à la tête (vive les soldes!), et de fêter nos 10.000 kilomètres dans un resto... indien!

 

Bishkek et le Kirghizistan sont à 250 kilomètres de là. La route est belle et longe les monts de l'Alatau qui culminent à près de 5000 mètres. De l'autre côté c'est le lac Issyk Kol, mais ça ce sera quelques jours plus tard. Les steppes c'est l'idéal pour camper. De grands espaces et une herbe confortable, des ciels superbes... Mais il faut savoir qu'on est toujours visibles! Les Kazakhs, à cheval ou à pied, scrutent les alentours avec leurs jumelles et 'paf!' on est repérés! Du coup, le soir c'est le défilé, alors comme on a bien appris la leçon, c'est nous qui offrons le thé.

 

La kirghizie est à portée de regard, et on rêve déjà aux lacs, aux chevaux, aux montagnes, on rêve… DEBOUT!!! il va falloir pédaler pour ça!